
La République et le Fardeau de ses Communautés : vers un anti-républicanisme à l’envers, par Grégoire Biyogo.
Par Grégoire Biyogo, jeudi 1 septembre 2011, 08:29.
1-Les Communautés seraient-elles antirépublicaines ? Ou est-ce au contraire l'anti-communautarisme exacerbé de la République qui est devenu obsolète et invite à promulguer une autre République (la VI ème) où cette question serait réglée, en plus de celle du pouvoir exorbitant et surdimensionné du Chef de l'Etat dans le contexte actuel d'équilibre des pouvoirs au sein du régime démocratique ?
2- Le fait est que la République ne sait ni penser ni intégrer les Communautés qui y vivent. La République en France se donne comme unique et indivisible, et promeut une Citoyenneté comportant les mêmes attributs. Elle ne s'accommode donc pas de communautarisme qu'elle dénie, stigmatise et l'accuse d'introduire des différences de régimes en son sein (origine, Histoire, langues, us et coutumes, croyances, formation, Ecole...), lesquelles en heurteraient violemment le sacro-principe de l'unicité et de l'indivisibilité, et finiraient à ce que l'on en dit, par la défigurer, la diluer dans une espèce de confusionnisme...
3-Pourtant, à y regarder de près, cette même France républicaine est habitée par plusieurs Communautés (Noire, maghrébine, juive, chinoise...). La République doit-elle impunément continuer de nier l'existence juridique de ces Communautés ou plutôt avoir le courage de s'adapter à l'évolution de cette situation en légiférant sans nécessairement trahir le principe d'indivisibilité ? En abordant de front l'Histoire qui s'attache à ces Communautés (Traite négrière, Colonisation, Guerre d'Algérie, Françafrique, Génocides...), on s’ouvre à la fraternité républicaine plutôt que de la liquider ou de l’enfermer dans le révisionnisme.
4-La vérité est qu'il n'est pas judicieux de liquider cette Histoire au nom de l'argument spécieux ici de l'unicité de la Citoyenneté, ni de nier l'existence de ces Communautés. Tel est le dilemme qui tétanise la République,
laquelle ne sait ni penser les Communautés qu'elle comporte en son sein avec des raisons historiques (NOTAMMENT la Communauté Noire) ni même les intégrer, elle considère les Français qui en sont issus comme des sujets communautaristes bien plus que comme des Citoyens normatifs, en concédant de la sorte un racisme juridique inexpugnable.
5-La République ne sait pas les intégrer dans les termes mêmes de la Citoyenneté qu'elle promeut sans les reléguer aux Communautés auxquels ils appartiennent. Et donc à ce même communautarisme qu'elle rejette tout à la fois. D'où la grande contradiction qui lamine son discours.
Mais il y a plus grave : elle utilise une nouvelle syntaxe très précisément antirépublicaine pour les désigner comme des Citoyens de seconde zone (des Français issus de la Diversité, introduisant au sein de l'indivisibilité et de l'unicité un sectarisme primaire) qui témoigne de son refus de l'unicité républicaine. Le misérabilisme de cette syntaxe alimente le différentialisme moribond du discours officiel dominant et en révèle l'anti-républicanisme forcené.
6-De la sorte, les usages dogmatiques, idéologiques et instrumentatalisants de la "Diversité" supposent la reconnaissance implicite du communautarisme sans avoir cependant le courage de le légiférer ou même d’en tirer toutes les conséquences dans la politique d’intégration. Ils contredisent la Constitution de 1958 elle-même.
7-Ainsi donc, le dogme de la Diversité à la française intègre par le bas et de la manière la plus sectaire. Il a créé une idéologie moribonde : le sous-républicanisme. Ou plutôt le contre-républicanisme. Car, il s'agit de l'Histoire d'un révisionnisme au sein du texte fondamental de la République.
8-Naguère l'on trouvait des Ministres africains, à proportion de l'importance des enjeux économiques et géostratégiques de la coopération bilatérale. Aujourd'hui, rien de tel : si ce ne sont les avatars de la "Françafrique décomplexée" et de la coopération unilatérale aux logiques des injonctions grotesques.
9-La Communauté Noire, généreuse, pacifiste et toujours acquise au sacrifice de la patrie en temps de conflits, et donc en cela toujours déjà républicaine, attachée au républicanisme, ne se reconnaît pas dans cette politique antirépublicaine et sa syntaxe identitariste, avec son
essentialisme. Et lorsque quelques pensées faibles et des journaleux mêlés en viendraient à la taxer d'anti-républicanisme, elle ne pourrait qu'y voir la surenchère d'une stigmatisation creuse, révisionniste et dangereuse.
10-En définitive, le véritable républicanisme se moque de l'anti-républicanisme dominant, épine dorsale de la politique actuelle, prompte à sacrifier les valeurs républicaines, en flirtant avec les idées les plus extrémistes à des fins électoralistes. Il restera toujours un impensé : le statut des Communautés dans un paysage politique qui prône la Diversité. On se serait attendu à ce qu'une telle réflexion fût à défaut d'être menée, simplement entr'ouverte. C'est que, le confinement des "Français" issus des Communautés extra-européennes à la sous-Citoyenneté est le meilleur exemple d'anti-républicanisme qui soit, lequel commande, si du moins l’on devait encore entendre un traitre mot à ce concept de « République », et demeurer dans l'Esprit même de la Constitution d'être corrigé, au nom de l'indivisibilité républicaine.
